2 novembre 2007
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20:16
La plupart du temps je n’ai pas trop de mal pour écrire mes chroniques. J’ai une structure assez précise en tête et mes doigts pianotent avec aisance sur le clavier de mon PC.
Mais tout à l’heure j’ai vu "Paranoid Park" de Gus Van Sant et ma première réflexion a été : "que vais-je pouvoir dire sur ce film ?".
Puis vient le temps de la réflexion, les mots naissent . Il y a des chroniques qui méritent d’être écrites "à chaud", d’autres ont besoin d’une certaine maturation.
Je m’attendais à voir un long métrage de qualité, j’ai vu un film ennuyeux et fade.
Attention je ne dénigre pas le cinéma de Gus Van Sant dans son ensemble : j’ai adoré "Elephant" (sa vision du massacre du lycée de Columbine) et le très dérangeant "Gerry", je n’ai juste pas accroché à "Paranoid Park".
Ce n’est pas la manière de réaliser qui me laisse sceptique (un mélange assez judicieux quand même de plans classiques et d’images "expérimentales" façon caméra 8mm) mais plutôt le propos. La forme trouble mais se conçoit. Le fond m’a laissé à distance.
Le récit est éclaté. Il faut attendre une bonne heure pour voir le fait divers tragique à la base du film. L’homicide involontaire est traité de manière expéditive. L’enquête de résume à de vagues face à face avec un membre de la police du coin.
Tardivement, on s’aperçoit que l’écriture est pour le personnage principal (je doute que dans la galaxie Van Sant, on puisse vraiment parler de « héros ») une forme accomplie de rédemption. Il relate son passé récent dans une lettre ouverte.
Je suis en général réceptif aux longs métrages qui adoptent des structures originales. Je crois que le summum a été atteint avec "Memento", "Irreversible" ou "5X2" mais dans "Paranoid Park" la déstructuration atteint ses limites et finit par lasser. Des scènes se répètent et l’histoire n’évolue guère.
On suit le film par la petit bout de la lorgnette au travers des yeux du jeune Alex. Les autres personnages et les situations ne sont là que pour troubler son univers.
J’ai trouvé le rythme inutilement lent. Heureusement que les comédiens amateurs apportent de la fraîcheur à ce long métrage. Le jeune Gabriel Nevins incarne à la perfection un adolescent détaché, silencieux. Sa composition souffle comme un vent nouveau sur l’océan des certitudes cinématographiques. A revoir à l’écran j’espère.
Le portrait de ce jeune adolescent est sans concession. Celui de la cellule familiale aussi. La figure du père est quasiment absente. Dans la seule scène du film où père et fils discutent, l’adulte reste très longtemps une forme floue au second plan. De même la mère est une silhouette distante, une voix lointaine.
Qui est ce jeune homme en définitive ? un garçon taciturne, qui communique peu (ses silences sont horripilants). Il a peu d’amis, peu de référents familiaux et sa relation avec sa petite amie se résume à une simple question : doivent-ils coucher ensemble ?
Le lieu où il sent vraiment chez lui est ce fameux "Paranoid Park" à Portland dans l'Oregon. Un endroit réputé pour abriter la délinquance et les sans-abri. En véritables esthètes, des lycéens y pratiquent le skate-board. En réalisateur de talent, Gus Van Sant filme ses moments comme des incurssions dans le monde de l'apesanteur.
On peut seulement imaginer que la poésie des mots le soulage d’un certain trouble.
La question au centre de ce long métrage est la suivante : comment réagir face à un dramatique événement ?. Les solutions ne sont pas nombreuses : le jeune Alex peut faire face (se livrer à la police) ou plier sous le poids de la faute (descente aux enfers, suicide ?). Il arrive cependant à trouver une troisième voie : la confession (au sens premier) par la narration du drame.
Les paroles s’envolent, les mots restes…
Pas si sûr.
Les chroniqueurs cinématographiques emploient parfois certaines expressions à tort et à travers. Mais pour une fois je trouve que parler de « film de genre » est assez judicieux. Je pense qu’il ne peut pas y avoir de demie mesure ou de compromis : on aime ou on n’aime pas.
Moi je n’ai pas aimé mais je vous laisse juge.
La construction est troublante, le dénouement aussi. Peut on dire que l’avant-dernière scène du film, Gus Van Sant absout son personnage ? Le pardon après la rédemption ?